Seul le désordre crée.


Seul le désordre crée.
A ces mots la jeune femme frissonna.
La chanson mille fois entendue n'avait  peut-être jamais vraiment été écoutée avec les oreilles du coeur et des tripes.
Dans la voiture, elle se sentit tout à coup envahie par un souffle de vie aussi puissant qu'un cyclone.
Quatre mots intimement ressentis, qui firent écho dans chacune de ses cellules.
La vie ne l'avait pas vraiment gâtée ces derniers mois -si tant est qu'on puisse attendre de l'existence les évènements comme des cadeaux-  la preuve: de grosses cernes tapissaient la moitié de son visage aussi blanc qu'un linge bouilli.
A force d'épreuves, de peurs et d'angoisses qui la saisissaient comme un collet, elle avait presque renoncé à une étincelle, même furtive, d'allégresse.
Et puis ces quatre mots-la l'avaient surprise un soir de mars.
L'évidence-même.
Au coeur de ce fouillis d'évènements malheureux, elle s'était trouvée, le temps d'une seconde, capable de transcender sa propre vie.
Bien sûr, il lui arrivait parfois de se surprendre à rêver d'un ailleurs ou d'une autre fois bien plus paisibles. Mais c'était comme si cette pensée n'était pas incarnée : une sorte de fantôme d'idée, sans drap blanc, plus léger qu'une brise d'été.
Mais cette fois c'était bien différent. Elle avait ressenti très très fort le sens de ces quatre mots.
Presque elle se serait arrêtée sur le boulevard pour l'écrire ou le hurler de suite.
Seul le désordre crée, Seul le désordre crée, Seul le désordre crée, Seul le désordre crée, Seul le désordre crée...
Elle avait compris alors ce qui coulait dans ses veines depuis tout ce temps : une envie incroyable de prendre de l'envol, d'agrandir son angle de perception des choses et du monde, une envie de créer comme jamais.
Juste parce qu'à force d'endurer, la cage se faisait bien trop petite.
Inventer des mondes insensés,
Créer l'impensable,
Edifier des mondes imaginaires,
Sublimer ce désordre jusqu'à le rendre beau, touchant, bouleversant.
Voila ce qu'elle avait compris grâce à l'homme qui avait écrit les quatre mots.
Finalement, il l'avait placée devant sa propre vérité.
Oui, l'art pouvait désormais changer le monde, et surtout le sien ...





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