On avait dix ans...



Souviens-toi, il y avait les frites le dimanche, les goûters, le pain beurré avec un carré de chocolat en rentrant de l'école, les expéditions dans la vie et les expériences secrètes, celles interdites. Il y avait nos amoureuses, elle d'abord, mais elle aussi. Se prendre la tête ? Jamais ! Il y avait l'odeur de cuisine chez Mamie, ça sentait toujours la faim mélangée à l'eau de Cologne. Le jardin au printemps était notre terrain de jeu tant désiré après un hiver où les flocons nous émerveillaient aussi. Tout était beau de toute façon. Il y avait l'odeur des Dragibus dans nos poches. Les habits en boule dans la chambre. Avec les copains de l'école, on était de vrais pirates l'après-midi, et le soir les bateaux Playmobil flottaient dans mon bain. Max & Compagnie n'étaient pas plus fort qu'Ulysse ou Jayce et les conquérants, mais Princesse Sarah était toujours là pour nous faire pleurer. Les histoires du soir, c'était pour les bébés. Nous, on les construisait dans nos têtes. Les bras de nos mamans portaient nos angoisses, et ainsi nos larmes devenaient du miel. Et puis les devoirs à faire, avant de pouvoir redevenir un enfant. Ce n'était pas notre priorité, et on faisait tout pour qu'elles ne le deviennent pas. Nos priorités ? C'était le plaisir d'affronter la vie par le jeu. Nous étions des chevaliers aux regards remplis d'étoiles. Les cabanes dans le seul arbre du parking, il n'y avait pas d'autre endroit, on prenait ce que l'on pouvait. On ne se privait pas. Ah les bêtises ! ... Ce pauvre vieux voisin qui nous surveillait de derrière son rideau. Le pauvre, qu'il pardonne notre insouciance. Faire pipi dans le lavabo ? c'était rigolo. Les petits Lu, on en mangeait d'abord les coins. Sauter dans les flaques, c'était drôle. On a connu nos premières boules au ventre, la gorge nouée lors des départs en colo, ou les jours de rentrée des classes. C'était comme nos bobos aux genoux, on nous arrachait à notre propre réalité. Tu avais beau pleurer, on te répétait sans cesse qu'il fallait passer par là, pour grandir. Moi, j'étais un super-héros, un chauffeur de taxi, un archéologue, le meilleur footballeur de la planète ! C'était ça le monde, le nôtre. Et maintenant, l'enfant que nous étions, de contraintes en contraintes d'adultes, peut mourir à petit feu...




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1 commentaire:

  1. On peut être à la fois archéologue, président de la république, inventeur de machines à rêver, meilleur footballeur de la planète, et super-héros ..même devenu grand, suffit de fermer les yeux et de se laisser porter par ses rêves !
    bon, ce texte, je l'aime, sûrement parce que ça me parle et que ça me touche ..et puis aussi parce que c'est bien écrit ...avec la langue du coeur, celle que je préfère ...
    je suis une grande fille, mais pas tout à fait ...!!!!!

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