Monsieur le Ministre,
Je tiens à vous faire part de mon mécontentement quant à la disparition du mot "étonnement" de bons nombres d'existences.
Ce mot, tel un goëland désespéré, s'en est allé je ne sais où, et a emporté avec lui les mots SURPRISE, INCONGRUITE et autres mots volants.
Ceci est une véritable tragédie monsieur le Ministre, car je me sens aujourd"hui seule et désolée, pour ma propre existence et pour celle de mes concitoyens.
Qu'allons-nous devenir sans étonnement ?
Quelle va être la dimension de nos existences si ce mot disparaît de la surface de la Terre ? Celà est inconcevable ... : une vie sans étonnement serait plate, dérisoirement plate ...
J'en appelle à votre responsabilité d'homme : le vent doit ramener ce mot dans les plus brefs délais, il faut absolument prendre les mesures nécessaires pour qu'une tempête de mots fous et déraisonnables s'abatte sur notre pays. J'ignore comment celà peut être rendu possible... des avions à réaction avec des sonars ultra-sophistiqués pourraient certainement nous aider dans cette mission humanitaire de la plus haute importance. Ou peut-être des cerf-volant géants capables de détecter de le moindre frissonnement d'étonnement sur un rayon de 25000 kilomètres.
Je pense aussi déployer une armée de boustrophédons spécialement formés à la reconnaissance de mot précieux dans un lieu tenu secret....A moins qu'un facteur ailé puisse, avec son vélo volant, aller déposer sur quelques nuages les milliers de lettres de colère que j'ai déjà rassemblées. La plupart de ces lettres ont été écrites par des enfants, des poètes, des magiciens, des écrivains qui souffrent cruellement de l'abscence du Mot.
Les descendants de messieurs Robert et Larousse ignorent comment combler le vide laissé cette fatale disparition...aucun synonyme ne se trouve à la hauteur du disparu, aucun canapé ne peut reposer les âmes esseulées, les mains figées, les pinceaux séchés, les corps qui ne pétillent plus.
Monsieur le Ministre, je ne pense pas que des guerrilleros seraient en mesure de résoudre le problème, les armes feraient fuir à tout jamais le disparu.
Il faut de la patience, de l'ingénuosité et surtout une tendresse infinie pour parvenir à nos fins.
Monsieur le Ministre de la Vie, j'ai en vous une grande confiance, et je suis sûre qu'un de ces jours, un nuage portant sur son dos le Trésor viendra redonner à nos existences la magie, la légèreté, la folie qui leur font cruellement défaut. Je crois en ce nuage, j'ai même décidé d'y accrocher mes plus grands espoirs.
Je vous prie, Monsieur le Ministre, d'agréer l'expression de mes rêves les plus fous.
Moi
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